Maghreb : les revendications pour le changement s'étendent
Lesechos.fr : La Libye a connu jeudi des « affrontements violents » tandis que de nouvelles manifestations se profilent en Algérie et au Maroc.
Les révolutions tunisienne et égyptienne continuent de faire des émules au Maghreb. A commencer par la Libye, un pays cerné par les deux révolutions. Selon les sites d'opposition Al Youm et Al-Manara, des « affrontements violents » entre manifestants et forces de l'ordre ont fait jeudi 17 février 6 morts et 35 blessés à Benghazi, la deuxième plus grande ville du pays, à 1.000 km à l'est de Tripoli. C'est là que, dans la nuit de mardi à mercredi, les manifestations avaient commencé, faisant 38 blessés.
Des appels relayés par Facebook et Twitter avaient incité les manifestants à faire du 17 février « la journée de la colère ». Des vidéos circulant sur Internet montrent des voitures brûlées et des manifestants scandant « le peuple veut faire tomber le régime. » A Al Baïda, à 200 km à l'est de Benghazi, d'autres manifestations ont fait au moins 2 morts.
« Des comptes à rendre à personne »
Ces chiffres sont évidemment à prendre avec précaution. La Libye est un pays où « la répression violente, policière et militaire, se fait à huis clos, hors caméra. On parle aujourd'hui de snipers et de tirs d'hélicoptères dans certaines villes, avance Hasni Abidi, directeur du Centre d'études et de recherches sur le monde arabe et méditerranéen (Cermam), à Genève. La Libye est le seul pays qui n'a de comptes à rendre à personne car elle n'a pas d'image à aménager et dispose d'une manne pétrolière qui la met de fait à l'abri de remarques d'autres pays. »
Amnesty International, Londres et l'Union européenne ont néanmoins appelé mercredi soir la Libye à éviter le recours à la force. Paris a déploré l'usage excessif de la force et les Etats-Unis ont demandé à Tripoli de « prendre des mesures spécifiques qui répondent aux aspirations, aux besoins et aux espoirs de leur peuple ».
Nouvelle marche samedi à Alger
L'Algérie n'est pas non plus en manque de slogans. Notre pays « est vraiment en marche pour un changement », déclarait jeudi Fodil Boumala, l'un des membres fondateurs de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD). Cette coalition née le 26 janvier dans la foulée des émeutes du début de cette année regroupe des partis d'opposition, la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme, des syndicats et des représentants de la société civile. La CNCD organise une nouvelle marche samedi à Alger, après celle avortée de samedi dernier qui n'a pas pu avoir lieu en raison d'un important dispositif de 30 000 policiers
Le président Bouteflika a tenté d'apaiser les esprits en annonçant le 3 février la levée de l'état d'urgence -elle devrait être effective d'ici à la fin du mois. L'état d'urgence avait été proclamé en 1992 au début d'une décennie de violences qui a fait au moins 150.000 morts. Pour certains experts, le poids de la guerre civile, encore très présent dans les esprits, fera emprunter à l'Algérie un chemin différent de celui de la Tunisie ou de l'Egypte. La colère des manifestants est pourtant bien présente. Nous ne voulons pas de « pseudo-solutions », clame la CNCD en évoquant l'annonce de la fin de l'état d'urgence.
Manifestations « pacifiques » au Maroc
Au Maroc, un pays que certains analystes mettraient volontiers à l'abri d'une révolution au motif que le roi est le commandeur des croyants, la contestation sociale est forte aussi. « La légitimité religieuse met le roi à l'abri, poursuit Hasni Abidi. Mais si la situation tourne mal, le Premier ministre El Fassi pourrait jouer le rôle de fusible dans ce pays où la corruption a atteint des sommets. » Des manifestations « pacifiques »sont attendues dimanche dans plusieurs villes du pays. Le mouvement islamiste Justice et bienfaisance a souhaité jeudi que cette manifestation débouche sur une « large réforme politique ».
Le Tunisien Ben Ali dans le coma depuis deux jours
L'ex-président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali, soixante-quatorze ans, qui a fui son pays le 14 janvier sous la pression de la rue, est « dans le coma » depuis deux jours dans un hôpital de Jeddah, en Arabie saoudite, suite à un accident cérébral, selon un proche de sa famille. Un peu plus tôt, le journaliste Nicolas Beau affirmait sur son blog que Ben Ali était dans un état grave et que, « pour des raisons de sécurité, le président déchu serait soigné sous l'identité d'un émir saoudien ».
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